Le coronavirus n’a pas freiné les envies d’entreprendre

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Avec 625 entreprises commerciales ou productives créées en 2020, Saint-Brieuc Armor Agglomération s’inscrit dans la tendance nationale qui a vu les créations se maintenir à un niveau soutenu malgré la crise de la Covid-19.

La création d’entreprise se porte bien sur Saint-Brieuc Armor Agglomération. Alors que la crise de la Covid-19 a mis à l’arrêt des pans entiers de l’économie, l’envie d’entreprendre a continué d’évoluer à un rythme soutenu en 2020 sur le territoire. Selon l’observatoire statistique du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, 625 entreprises commerciales ou productives (hors SCI et SCCV) ont été immatriculées aux greffes de Saint-Brieuc et Saint-Malo l’an passé. Elles étaient 631 en 2019.

Mieux encore, l’agglomération de Saint-Brieuc a confirmé son statut de terre fertile pour les porteurs de projet avec un ratio de 5,3 créateurs pour 1 000 habitants, contre 3,4/1 000 à l’échelle départementale et 2,4/1 000 à l’échelle bretonne. «  Après le stress du printemps 2020, l’activité est bien repartie après le déconfinement, confirme Jean-Charles Minier, directeur de Baie d’Armor EntreprisesNous avons accueilli 9 nouvelles sociétés en pépinière alors que notre moyenne, sur 10 ans, est de 6,8 et qu’en 2019, elles étaient seulement 6.  »

 

Livraison et réparation automobile

Cette dynamique est confirmée par la plate-forme Initiative Armor. «  Nous avons reçu de nombreux projets d’entrepreneuriat, notamment en fin d’année,confirme Cécile Le Bihan, directrice de la structure. Sur l’agglomération, c’est 98 dossiers auxquels nous avons accordé un prêt d’honneur. Après un cru 2019 déjà exceptionnel, nous restons dans la fourchette haute des cinq dernières années.  »

S’il confirme la vitalité briochine, Fabien Thomas fait preuve de prudence au regard de la typologie des entreprises créées. «  Les microentreprises ont été davantage contributrices en 2020 avec 238 unités, contre 197 en 2019, précise le responsable études pour la CCI Côtes-d'ArmorLa livraison de repas à domicile et la réparation automobile portent la création dans les communes de Saint-Brieuc Armor Agglomération. Dans ce contexte, on peut se poser la question de leur viabilité sur le long terme, notamment si elles répondent à des opportunités de marché ou viennent juste compléter une activité salariée, impactée par le chômage partiel.  »

 

L’enjeu de l’accompagnement

Au sein des Coopératives d’activités et d’emploi des Côtes-d’Armor, cette précarisation de la création est bien ressentie. «  Même si la dynamique est plus forte avec la crise sanitaire, elle s’explique davantage par une dégradation de l’économie, confirme Sylvain Couasnon, co-gérant d’Avant-PremièresFaute de trouver du travail, les demandeurs d’emploi se mettent à leur compte.  »
Les CAE constatent, toutefois, être sollicitées, de plus en plus, par des personnes qui veulent changer de vie. «  Ce sont autant des Briochins que des personnes d’Ile-de-France ou de l’Est qui veulent vivre dans un environnement plus favorable. Elles apprécient l’accompagnement trouvé ici, porté par un écosystème complet au service des porteurs de projet.  » Un avis partagé par Jean-Charles Minier : «  Les confinements et la visioconférence pèsent sur la prospection commerciale et la visibilité d’une jeune entreprise. L’enjeu de l’accompagnement en réseau est central.  »

 

 

« L’écosystème de la création d’entreprise est une chance »

Ancien cadre bancaire, Stéphane Mahé s’est lancé dans la création d’entreprise en janvier 2020, deux mois avant la mise en place du premier confinement. Il confirme que le soutien de l’écosystème local est précieux en cette période mouvementée.

 

Sa société est hébergée dans un atelier de la pépinière Baie d’Armor Entreprises. Elle a mis en place son process de lactofermentation avec le soutien de Zoopôle Développement et, à titre personnel, il bénéficie du concours financier d’Initiative Armor, du Réseau Entreprendre Bretagne et de l’incubateur Emergys Bretagne.

À 52 ans, Stéphane Mahé, fondateur de la société Algroupe à Ploufragan, est l’exemple même qu’un projet de création d’entreprise passe, avant toute chose, par un bon accompagnement. «  C’est même quelque chose de fondamental car rien n’est tracé, encore plus dans la période actuelle. Ce riche écosystème briochin dédié à la création est une chance. On y trouve des compétences, des conseils, la possibilité de prendre du recul, etc.  »

Un ingrédient nommé Algood

 

Ancien cadre bancaire, de formation agro, Stéphane Mahé a investi 250 000 euros dans un process de fermentation des algues bretonnes pour en faire un ingrédient alimentaire. Son nom : Algood. «  Les algues sont récoltées à Paimpol, Perros-Guirec, Roscoff. À l’image de la choucroute, des bactéries lactiques valorisent leur goût et leur texture, tout en préservant leurs qualités nutritionnelles.  »

Après six mois de R&D, Algroupe est aujourd’hui en phase active pour commercialiser Algood auprès des industriels de l’agroalimentaire. «  Cette innovation s'intègre dans des salades, des plats cuisinés, des soupes, etc. Et par chance, pour l’instant, la Covid-19 n’impacte pas trop mes efforts de prospection pour bien lancer mon activité.  »

 

 

Le tribunal de commerce sera vigilant à l’égard des entreprises créées en 2020

Président du tribunal de commerce de Saint-Brieuc, Gilles Henrio confirme que les sociétés créées en 2020 l’ont été avec des fonds de roulement insuffisants, ce qui les rend plus fragiles.
 

Gilles Henrio est aussi confiant qu’attentif. S’il salue le dynamisme de la création d’entreprise en Côtes-d’Armor, le président du Tribunal de commerce de Saint-Brieuc reste vigilant quant à la solidité des sociétés inscrites au registre du commerce en 2020. «  Si le solde entre les immatriculations et les radiations est positif de 2 %, la mise de départ, notamment pour financer le fond de roulement, est insuffisante, précise Gilles Henrio. Plus de 70 % des 1960 créations, l’an passé en Côtes-d’Armor, ont été réalisées avec un capital inférieur à 10 000 euros. Dans un contexte incertain, où les tarifs sont toujours tirés vers le bas, le risque est grand de voir de nombreuses entreprises ne pas résister aux fluctuations de leur marché.  »

Respecter les fondamentaux

Sans jouer les Cassandres, Gilles Henrio appelle les créateurs à faire preuve de prudence et surtout à bien s’entourer afin d’éviter la cessation de paiements. «  Le rôle du juge est aussi de rappeler qu’une entreprise du futur devient vite une société du passé si les fondamentaux ne sont pas respectés. Le tribunal de commerce est l’une des portes d’entrée en cas de coup dur. En 2020, notre juridiction a démontré sa capacité à amortir les effets de la crise à travers la mise en place de mandats ad hoc, de conciliations, de sauvegardes ou de rétablissements professionnels, une procédure adaptée aux jeunes ou petites entreprises individuelles et artisanales.  »